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18 juin 2024

Déficit de financement des infrastructures pour les Premières Nations, une préoccupation croissante

Dans sa lettre de mandat, la ministre des Services aux Autochtones s’est vu confier le mandat d’« éliminer tous les avis à long terme concernant la qualité de l’eau potable qui subsistent, et de combler les écarts en matière d’infrastructures d’ici 2030, en mettant l’accent sur la construction de logements durables et abordables. » Il s’agit d’un objectif louable, mais quels sont exactement les écarts en matière d’infrastructures ressentis par les Premières Nations, que faut-il faire pour atteindre l’objectif de combler les écarts, et le gouvernement s’efforce-t-il réellement d’atteindre cet objectif?

En ce qui concerne le premier point, les écarts en matière d’infrastructures entre les communautés des Premières Nations et les communautés non autochtones peuvent facilement être illustrés par ce à quoi les communautés ont accès et, plus important encore, par ce à quoi elles n’ont pas accès. L’eau potable, par exemple, est l’un des fossés les plus visibles entre les communautés des Premières Nations et les communautés non autochtones, à tel point que nous parlons depuis des décennies d’éliminer les avis d’ébullition de l’eau dans les réserves et que la question est si persistante qu’elle figure dans la lettre de mandat de la ministre. Il est essentiel d’éliminer les avis d’ébullition de l’eau, mais la question demeure l’un des écarts en matière d’infrastructures les plus critiques pour 28 communautés des Premières Nations au Canada.

L’Assemblée des Premières Nations (APN) a récemment publié un rapport sur le montant exact que le gouvernement fédéral devrait dépenser pour combler les écarts en matière d’infrastructures, et le montant est franchement stupéfiant. Dans son rapport, l’APN estime que le gouvernement fédéral devrait investir 349,2 milliards de dollars pour respecter les engagements énoncés dans la lettre de mandat de la ministre des Services aux Autochtones, à savoir combler les lacunes d’ici 2030. Il s’agit certes d’une somme énorme, mais le montant est censé tenir compte des gouvernements qui se sont succédé au cours de l’histoire du pays et qui ont refusé de répondre aux besoins des Premières Nations. Le rapport constitue une sorte de demande de budget adressée au gouvernement fédéral pour l’orienter quant aux écarts en matière d’infrastructures essentielles. Le financement demandé ne dépasse pas celui qui concerne les Canadiens non autochtones. Les calculs connexes sont effectués de sorte à permettre aux communautés des Premières Nations d’atteindre le même niveau d’infrastructure et d’accès aux services dont bénéficient les communautés non autochtones.

Alors, où faudrait-il investir et comment le gouvernement s’y prend-il actuellement pour réduire les écarts en matière d’infrastructures? L’APN a procédé à une évaluation complète des coûts et indique les investissements qui seraient nécessaires dans 10 catégories, notamment : 12,6 milliards de dollars en éducation; 35,5 milliards de dollars pour l’accès routier annuel; 30,9 milliards de dollars pour les mesures d’adaptation aux changements climatiques; 12,7 milliards de dollars pour la carboneutralité; 1,6 milliard de dollars pour l’accessibilité; 135,1 milliards de dollars pour le logement; 59,5 milliards de dollars pour les infrastructures (plus précisément, les ports, les infrastructures de transport, les infrastructures de services publics, etc.); 5,2 milliards de dollars pour la connectivité numérique; 0,7 milliard de dollars pour les avis qui subsistent d’ébullition de l’eau potable d’une importance capitale; et 55,4 milliards de dollars pour 401 demandes directes des Premières Nations déjà adressées à Services aux Autochtones Canada (qui comprennent le financement de centres culturels, de programmes sociaux, de biens récréatifs tels que les parcs, etc.).

Bien que la ministre maintienne qu’elle atteindra l’objectif énoncé dans sa lettre de mandat, le fait est que davantage d’investissements sont nécessaires. L’année dernière, des documents ont montré que le gouvernement n’avait dépensé que 2,37 milliards de dollars entre 2015 et le début de 2023, ce qui est loin d’être suffisant pour répondre aux besoins de l’APN en matière de logement des Premières Nations. Le budget de 2024 proposait des investissements de seulement « 918 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2024‑2025, pour permettre à Services aux Autochtones Canada et à Relations Couronne‑Autochtones et Affaires du Nord Canada d’accélérer les travaux visant à cerner les lacunes en matière de logement et d’infrastructure des Premières Nations, des Inuits et des Métis. »

Ces investissements sont loin d’être suffisants. Soyons clairs : il s’agit bien d’investissements. Les dépenses d’infrastructure sont traditionnellement l’une des meilleures mesures qu’un gouvernement puisse prendre, car elles permettent de créer des emplois et de relancer les économies locales. La vérificatrice générale Karen Hogan a récemment publié un rapport indiquant que, comparativement aux personnes non autochtones, les membres des communautés des Premières Nations sont quatre fois plus susceptibles de vivre dans des logements surpeuplés et six fois plus susceptibles de vivre dans des logements nécessitant des réparations importantes. La situation est inacceptable.

Il est essentiel de combler les lacunes en matière de logement et d’infrastructure dans les communautés des Premières Nations. Il est temps que la ministre des Services aux Autochtones remplisse son mandat et que le gouvernement fédéral donne la priorité aux investissements dans les infrastructures des communautés autochtones.