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5 novembre 2024

Est-il temps d’être plus sévère à l’égard du négationnisme concernant les pensionnats autochtones?

Dès les premiers jours qui ont précédé la Confédération, les premiers dirigeants des colons canadiens ont traité les peuples autochtones avec si peu d’égards. Ils ont créé des systèmes destinés à assimiler les peuples autochtones et à les dépouiller de leur identité et de leur culture. L’un des éléments les plus largement reconnus de cette discrimination systémique a été la création de pensionnats. Soutenu par le premier ministre du Canada, John A. MacDonald, le ministère des Affaires indiennes et diverses confessions d’églises chrétiennes, le gouvernement a poursuivi une politique d’« assimilation agressive » recommandée dans un rapport du député Nicholas Flood Davin qui a servi de base à la création du système des pensionnats en 1879.

Pendant près de 150 ans, le gouvernement du Canada a enlevé 150 000 enfants autochtones et les a envoyés dans des pensionnats, comme l’a minutieusement montré la Commission de vérité et réconciliation. Dans tout le pays, des enfants ont été déplacés, souvent très loin de chez eux, et ils ont subi des violences physiques, sexuelles et psychologiques, en plus d’être dépossédés de leur culture et de leur langue. Le gouvernement présentera des excuses pour ces abus en 2008, mais les horreurs du système deviendront encore plus évidentes dans le discours public en 2021, avec la découverte de nombreuses tombes anonymes dans l’ancien pensionnat indien de Kamloops. Cette découverte a déclenché d’autres recherches dans d’autres anciens pensionnats, notamment à Marieval et à Cowessess. En 2022, le Parlement qualifiera enfin, à juste titre et à l’unanimité, cet acte de génocide, comme le stipule l’article II de la Convention sur le génocide des Nations Unies. En 2022 également, le pape présentera des excuses pour le rôle de l’Église catholique dans le système des pensionnats autochtones. Selon certaines estimations, le nombre d’enfants décédés dans les pensionnats s’élèverait à environ 6 000, mais les archives du gouvernement et des églises sont incomplètes et nous ne connaîtrons peut-être jamais le nombre total d’enfants qui ont péri dans ces établissements.

Tous ces détails sont importants, mais ils ne font qu’effleurer la recherche exhaustive contenue dans le rapport de la Commission de vérité et réconciliation. S’il est essentiel que nous reconnaissions ce génocide, le négationnisme concernant les pensionnats autochtones reste un problème important. Certaines personnes au plus haut niveau de l’État, comme un éminent sénateur, ont tenté de minimiser l’impact du génocide des pensionnats et ont qualifié ces crimes horribles de « bien intentionnés ». Le tueur en série de Winnipeg, Jeremy Skibicki, avait affiché sur les médias sociaux des propos indiquant un négationnisme concernant les pensionnats autochtones.

Kimberly Murray, l’interlocutrice spéciale indépendante pour les enfants disparus, les tombes et les sépultures anonymes en lien avec les pensionnats indiens, a constaté, à la suite de la publication d’un rapport sur le sujet, que le négationnisme concernant les pensionnats indiens était en fait plus marqué. Elle a déclaré que le déni est violent, calculé, nuisible et haineux. Elle a raison. Le négationnisme est une forme de discrimination directe à l’égard des populations autochtones, une forme de manipulation de leurs expériences vécues. Il ne fait que protéger le statu quo colonial et vise à déformer les faits et à saper la confiance du public dans le processus de recherche de la vérité et de réconciliation de l’histoire commune des peuples autochtones et non autochtones. En raison de la mauvaise tenue des registres, nous ne connaissons pas le nombre réel d’enfants décédés dans les pensionnats.

Dans cette optique, comment lutter contre le négationnisme? Il est important que nous continuions à mettre en œuvre les appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation, notamment les appels 71 à 76, qui concernent spécifiquement l’emplacement des tombes anonymes potentielles, et les appels 62 à 65, qui demandent un financement plus important pour l’éducation afin d’aider à enseigner aux Canadiens les horreurs du système des pensionnats autochtones. Par ailleurs, la députée Leah Gazan, qui a présenté la motion demandant à qualifier le système des pensionnats de génocide, a élaboré le projet de loi C-413, qui ajouterait au Code criminel une infraction le fait de fomenter volontairement la haine contre les peuples autochtones en cautionnant, en niant, en minimisant et en justifiant les dommages causés par le système des pensionnats indiens au Canada. Le projet de loi est assez nuancé et prévoit des exceptions raisonnables. Les déclarations véridiques, si elles sont pertinentes pour l’intérêt public, celles destinées à souligner la haine envers les peuples autochtones, ou les opinions religieuses, seraient exemptées. Le gouvernement a apporté une modification similaire au Code criminel afin d’interdire la communication d’une déclaration qui « fomente volontairement l’antisémitisme en cautionnant, en niant ou en minimisant l’Holocauste ». Bien que le ministère de la Justice n’ait produit aucune accusation ou poursuite ni confirmé une telle chose de ses homologues provinciaux, le fait de pouvoir recourir au Code criminel à cet effet permet d’engager des poursuites contre les pires négationnistes.

Le meilleur moyen de combattre l’ignorance sera toujours l’éducation et la compréhension. Toutefois, dans les cas extrêmes qui permettent à la haine de se développer, des poursuites pénales devraient peut-être être envisagées.