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1 février 2024

La vente des services de ti de Postes Canada va à l’encontre des réclamations du gouvernement relatives à l’externalisation

Au fil des années, le gouvernement fédéral s’est de plus en plus appuyé sur l’externalisation vers des entreprises privées pour faire son travail. Il est bien vrai que la sous-traitance doit toujours exister afin que soient fournies les prestations que le gouvernement n’est pas suffisamment outillé pour effectuer lui-même, mais le taux auquel le gouvernement (et par extension les contribuables) utilise les entreprises privées pour faire son travail a tellement augmenté ces dernières années que le Conseil du Trésor a, depuis quelques mois, publié des lignes directrices sur la réduction de l’externalisation et du dispendieux travail de consultation. Il est donc un peu frustrant, mais certainement pas surprenant, de voir Postes Canada commencer à retirer discrètement certaines de ses activités commerciales et à les vendre à des entreprises non gouvernementales, ce qui à la longue est susceptible d’entraîner une augmentation des coûts et une mauvaise qualité des services.

Postes Canada est une société d’État, qui relève du gouvernement fédéral et qui est conçue pour fonctionner en tant que principal service postal du pays. Elle exploite trois filiales : Innovaposte, responsable de ses services informatiques; Purolator, son service de messagerie; et SCI, son entreprise de logistique tierce, qui fait dans l’entreposage, la distribution et le transport. Deux de ces filiales ont été vendues récemment. SCI a récemment été vendue à Chaîne d’Approvisionnement Metro basée à Montréal, et Innovaposte a été vendue à Deloitte Canada. Pour l’instant, nous n’avons pas de détails précis sur la nature de ces transactions, mais il est difficile d’imaginer que les contribuables, les employés des postes et les usagers en seront les principaux bénéficiaires. Dans un proche avenir, Postes Canada devra passer par les entreprises privées pour réaliser le travail qu’il fait déjà.

Le plan du gouvernement dans le budget 2023 proposait de réduire de 15 % les dépenses liées à l’externalisation, ce qui permettrait d’économiser 7,1 milliards de dollars au cours des quatre prochaines années. Il est difficile de comprendre comment le gouvernement entend réduire ces coûts d’externalisation lorsqu’une société d’État vend l’essentiel de ses activités commerciales. Selon le directeur parlementaire du budget, les dépenses consacrées aux services professionnels et spéciaux ont atteint des niveaux record, soit 21,6 milliards de dollars en 2023-2024. Toutefois, cela n’est pas un problème nouveau et, souvent, les problèmes liés à l’externalisation ne deviennent apparents que lorsque le gouvernement est coincé avec ses partenaires d’externalisation. Le contrat signé sous Harper avec IBM dans le cadre de la catastrophe connue sous le nom de Phénix est peut-être le plus connu des contrats, mais, au cours des huit dernières années, le gouvernement a sous-traité près d’un milliard de dollars à PricewaterhouseCoopers et des centaines de millions de dollars à des entreprises comme McKinsey, Accenture et KPMG. Toutefois, Deloitte semble être le plus grand bénéficiaire, qui gagne environ 1 milliard de dollars en contrats gouvernementaux, ce qui ne fera qu’augmenter avec l’achat d’Innovaposte.

Pour sa part, Postes Canada perd de l’argent depuis un certain nombre d’années; elle a notamment perdu un demi-milliard de dollars en 2022. Cela ne sert à rien à Postes Canada d’agir comme si elle n’était pas confrontée à des défis financiers, notamment de la part de géants du commerce électronique comme Amazon. Certes, la décision de vendre certaines parties de son modèle d’affaires allège la situation financière de Postes Canada à court terme et devient plus agile à l’avenir, mais cela démontre également un sérieux manque de volonté de la part du gouvernement de réduire les coûts d’externalisation. Certains ont fait valoir que Postes Canada doit rapidement se tourner vers le commerce électronique et fournir ce service de « dernier kilomètre » pour les courriers, compte tenu de la capacité de la société d’État d’atteindre quelque 16 millions de ménages. Le service postal des États-Unis a connu un relatif succès dans le cadre de cette adaptation de dernier kilomètre. Le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes a proposé que Postes Canada s’étende à des secteurs comme les services bancaires postaux, qui peuvent offrir plus d’options financières aux populations des communautés rurales, éloignées et autochtones.

Postes Canada offre un service essentiel aux Canadiens et, à ce titre, doit demeurer une société d’État conçue pour les servir, d’abord et avant tout. Il est indispensable que le gouvernement cesse de vendre ce service, car, à long terme, un autre contrat avec une entreprise privée pour un niveau de service inférieur sera la norme. C’est ce à quoi nous avons assisté ces dernières années avec la privatisation des services de santé mentale des anciens combattants dans le cadre du contrat de 560 millions de dollars que Loblaws a signé avec Partenaires des services de réadaptation aux vétérans canadiens (PSRVC). Nous devons mettre fin à ce cycle où le contribuable paie la facture pour des services de plus en plus médiocres qu’il reçoit par l’entremise de contrats externalisés; Phénix en est l’illustration.