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27 mars 2023

Les Canadiens ont besoin d’une enquête publique sur l’ingérence électorale de la Chine

Les Canadiens aiment à penser que leur régime électoral est inattaquable. C’est vrai que celui-ci est doté d’un certain nombre de garde-fous permettant de garantir l’intégrité des élections. Nous avons fixé une limite aux sommes qu’une même personne peut donner aux candidats à une élection et avons fait le nécessaire pour que les entreprises ne puissent pas influencer indûment les élus. Nous vérifions aussi les dépenses des candidats pour nous assurer qu’ils ont respecté les règles électorales. Cela dit, le régime canadien n’est pas parfait pour autant, et dernièrement, il est ressorti de rapports du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) ayant fait l’objet de fuites que des diplomates de Pékin et des représentants du Parti communiste de Chine se sont immiscés dans les deux plus récentes élections générales.

Le réseau Global News est le premier à avoir diffusé un reportage sur les fuites en question, et on y apprenait que, lors du scrutin de 2019, la Chine avait orchestré une véritable campagne d’ingérence visant 11 candidats. Au même moment, le SCRS aurait pressé le Parti libéral d’annuler la candidature d’un homme qui est aujourd’hui député au motif qu’il aurait fait partie du réseau chinois d’ingérence étrangère. Le rapport du SCRS nous apprend en outre que les diplomates et les représentants chinois ont fait des dons non déclarés en argent afin d’aider les candidats les plus susceptibles d’être favorables à la Chine à battre ceux qui s’opposaient à Pékin. En 2021, les candidats visés par ces allégations étaient à la fois libéraux et conservateurs.

Ces insinuations sont assez graves pour que les Canadiens se demandent si les élections canadiennes sont bel et bien libres et justes. Selon le groupe responsable du Protocole public en cas d’incident électoral majeur, qui est composé de hauts fonctionnaires, « les organismes de sécurité nationale ont constaté des tentatives d’ingérence étrangère, mais pas suffisamment pour atteindre le seuil d’incidence sur l’intégrité électorale ». Bien qu’il s’agisse d’une distinction importante, car elle nous apprend qu’aux yeux du groupe, les dernières élections ont été justes, il faut tout faire pour que les scrutins à venir soient à l’abri de l’ingérence étrangère. Il ne faut pas oublier non plus que le groupe responsable du Protocole public en cas d’incident électoral majeur a beau être composé de personnes exceptionnellement talentueuses, ce sont malgré tout des fonctionnaires agissant au nom du gouvernement.

Voilà pourquoi il faut une enquête publique. Nous devons avoir la certitude que ceux qui sont chargés de scruter le régime électoral et de détecter les agents étrangers cherchant à l’influencer sont indépendants du gouvernement. Nous devons également voir si, à part la Chine, d’autres agents étrangers ont pu s’ingérer dans nos campagnes électorales (pensons par exemple à la Russie, laquelle, selon le SCRS, a souvent tenté d’utiliser des robots pour influencer le processus électoral canadien en passant par les réseaux sociaux).

Or, au lieu de lancer une enquête publique, le premier ministre a jeté son dévolu sur un rapporteur spécial pour faire la lumière sur ces allégations. Il s’agit de l’ancien gouverneur général David Johnston. Nommé par l’ancien premier ministre conservateur Stephen Harper, M. Johnston est considéré comme un choix plutôt raisonnable, même si le fait qu’il siège au conseil d’administration de la Fondation Pierre Elliott Trudeau est loin de nous rassurer sur son impartialité. Selon la teneur de ses conclusions, il se pourrait bien que M. Johnston recommande la tenue d’une enquête publique. On a donc l’impression que sa nomination ne fait que retarder l’inévitable.

Le NPD a saisi le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre d’une motion réclamant la tenue d’une enquête publique. Cette motion a été adoptée, sauf qu’en vertu de la Loi sur les enquêtes, la décision finale revient au premier ministre. La motion du NPD propose en outre de s’intéresser à toutes les occurrences où un gouvernement étranger hostile a abusé de ses ressortissants habitant au Canada, quelle que soit l’issue d’une telle enquête. Qui sait, peut-être découvrira-t-on que d’autres pays, comme la Russie ou l’Iran, se sont rendus coupables d’ingérence électorale.

Les conservateurs ont eux aussi saisi la Chambre des communes d’une motion, mais celle-ci est plus pointue et s’en tient à la seule ingérence électorale possible de la Chine. On dirait que les conservateurs ont peur d’aborder le dossier dans son ensemble et ne se préoccupent que de l’ingérence électorale. Si nous voulons vraiment savoir quels agents étrangers ont pu s’immiscer dans le processus électoral canadien, il faut laisser la future commission d’enquête faire son travail jusqu’au bout, peu importe ce qu’elle pourrait découvrir.

Les Canadiens ont le droit d’avoir la certitude que leur processus électoral est juste, et seule une enquête publique leur donnera cette certitude.