16 octobre 2023
Les coupes dans le budget du MDN ne doivent pas avoir une incidence sur les militaires
Les ministres du gouvernement ont été chargés de trouver 15 milliards de dollars de réduction des dépenses publiques pour tenter de maîtriser les dépenses et de trouver des moyens de réduire le gaspillage discrétionnaire entre 2023 et 2028. Le budget de 2023 prévoit que le gouvernement réalise ces économies au cours de cette période de cinq ans en réduisant de 15 % les honoraires des consultants, les déplacements et les autres services professionnels discrétionnaires, et en diminuant de 3 % les dépenses des ministères. Parmi les ministères qui devraient réduire considérablement leurs dépenses figure le ministère de la Défense nationale (MDN). Si les plans de réduction des dépenses inutiles sont louables, ces réductions ne peuvent pas se faire au détriment des militaires et de leurs familles.
Le budget principal du MDN pour l’exercice 2023-2024 prévoit un budget total de 26,5 milliards de dollars. Des hauts gradés de l’armée, notamment le général Wayne Eyre, chef d’état-major de la défense, ont fait part de leurs inquiétudes concernant l’exercice de réduction des coûts. Ce dernier a d’ailleurs déclaré ceci au Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes : « Il est impossible de réduire de près d’un milliard de dollars le budget de la Défense sans que cela ait des répercussions ». Bien que le ministre de la Défense ait déclaré à plusieurs reprises que l’exercice de réduction des coûts n’est pas une réduction budgétaire (et d’une certaine manière, il peut techniquement avoir raison, étant donné les augmentations prévues du budget du Ministère à 39,7 milliards de dollars en 2026-2027), on s’interroge sérieusement sur la possibilité que les réductions n’aient aucun impact sur les militaires.
Il est clair que nous vivons dans une époque où la préparation militaire est d’une importance vitale. Bien que le Canada n’ait pas été en guerre depuis son retrait de l’Afghanistan en 2014, les conflits mondiaux en Ukraine et maintenant en Israël signifient que nous devons être préparés de manière adéquate pour l’avenir.
De nouvelles mesures ont été mises en place cette année en ce qui concerne les indemnités de logement du personnel militaire, également connues sous le nom d’indemnité de vie chère (IVC). La formule de calcul de l’indemnité de logement du militaire n’est plus basée sur le lieu d’affectation, mais sur le salaire. Ce changement permettrait au gouvernement de générer des économies d’environ 30 millions de dollars par an, mais celles-ci ne valent pas les difficultés qu’elles causent à nos militaires.
Une note d’information récente de l’aumônier général Guy Bélisle, adressée au général Eyre, expose les problèmes que pose ce changement. On peut y lire que « les six derniers mois ont été très difficiles pour de nombreux membres des FAC et leurs familles qui s’efforcent de trouver un moyen d’aller de l’avant en dépit des réalités et des changements économiques, sociaux et culturels auxquels sont confrontés tous les Canadiens en cette période d’incertitude [traduction] ». La note précise également ce qui suit : « Le moral des membres des FAC a été évalué par les aumôniers au cours de la présente période de rapport comme étant considérablement plus bas qu’au cours des dernières périodes de rapport, en raison de plusieurs facteurs et réalités clés […] Les changements apportés à l’IVC, le manque croissant de logements abordables, l’augmentation du coût de la vie et les pénuries de personnel ont tous contribué à exacerber les tensions et les défis auxquels font face les membres et leurs familles [traduction] ».
Bien qu’ils ne soient pas la principale source de réduction des dépenses du MDN, les changements apportés au système d’IVC ont clairement un impact négatif sur le bien-être des familles des militaires. Les Forces canadiennes ont déjà du mal à recruter, puisqu’on estime à 10 000 le nombre de postes vacants. Rendre plus difficile l’obtention d’accommodements adéquats ne va pas contribuer aux efforts de recrutement.
Le problème auquel nous sommes confrontés aujourd’hui est en partie dû à une mauvaise planification à long terme des dépenses militaires. Le précédent gouvernement conservateur nous a lié les mains avec l’achat de chasseurs F-35, des avions dont le prix est exorbitant et dont la capacité à répondre aux besoins de notre armée suscite de vives inquiétudes. Tandis que le premier ministre avait fait campagne sur l’abandon de cet achat en 2015, son gouvernement s’est engagé cette année à conclure un contrat de 19 milliards de dollars avec Lockheed-Martin pour l’achat de 88 avions F-35. Ainsi, alors que le MDN est invité, comme d’autres ministères, à réduire ses dépenses, il n’est pas raisonnable de penser que d’autres ministères sont invités à réduire leurs dépenses alors que le MDN dispose de 19 milliards de dollars en réserve.
Le principe de base de la réduction des coûts administratifs dans les administrations publiques est bon. Il est clair qu’il y a des gaspillages qui peuvent et doivent être réduits. Il est difficile de justifier des frais de déplacement pour les réunions alors que nous nous sommes tous habitués à utiliser Zoom au cours des dernières années. Néanmoins, les réductions de coûts ne devraient jamais se faire au détriment des militaires et de leurs familles.