20 février 2024
Le développement de l’application ArriveCan, un parfait exemple de gaspillage des fonds publics
Plus tôt cette semaine, la vérificatrice générale Karen Hogan a rendu public son rapport tant attendu sur les coûts associés au développement de l’application ArriveCAN, grandement critiquée. Le rapport est une critique cinglante du processus d’approvisionnement du gouvernement au début de la pandémie de COVID-19 et de sa dépendance à l’égard d’experts-conseils coûteux qui n’en donnent pas pour leur argent aux Canadiens.
Lancée en avril 2020, l’application ArriveCAN visait à faire le suivi des renseignements sur la santé et des coordonnées des personnes qui entraient au Canada pendant la pandémie de COVID-19. À une époque où les déplacements entre les pays étaient très limités, ArriveCAN était présentée comme un moyen de simplifier le processus. L’application visait également à permettre aux voyageurs de faciliter leurs déclarations aux postes frontaliers.
Le rapport du Bureau de la vérificatrice générale mentionne que le coût de l’application est estimé à 59,5 millions de dollars, dont une partie importante a été versée à des sociétés d’experts-conseils. Soulignons que « estimé » est le mot clé, car l’une des principales constatations du Bureau de la vérificatrice générale est que le coût final de l’application ArriveCAN est impossible à déterminer, notamment en raison de la mauvaise tenue des dossiers financiers de ceux qui ont participé à sa conception. Le rapport du Bureau de la vérificatrice générale indique que :
« Dans l’ensemble, nous avons conclu que l’Agence des services frontaliers du Canada, l’Agence de la santé publique du Canada et Services publics et Approvisionnement Canada n’avaient pas géré tous les aspects de l’application ArriveCAN en tenant dûment compte de l’optimisation des ressources. Des lacunes dans la passation de marchés et l’approvisionnement, la documentation et la gestion des produits livrables font également en sorte que nous n’avons pas pu déterminer le coût précis de l’application. »
Ce gaspillage troublant de l’argent des contribuables dès le début de la pandémie est un problème grave. Bien que cette estimation de 59,5 millions de dollars soit la meilleure supposition de la vérificatrice générale quant au montant réel dépensé pour la conception de l’application, c’est en raison du manque de documentation qu’il est si difficile de déterminer le montant d’argent précis dépensé par le gouvernement.
L’un des principaux problèmes relevés dans le rapport de la vérificatrice générale est, une fois de plus, la dépendance excessive du gouvernement à l’égard des sociétés d’experts-conseils et des marchés attribués à un fournisseur unique. Dans son rapport, Mme Hogan fait état de graves préoccupations à l’égard de GC Strategies, une société d’experts-conseils qui ne compte que deux employés, qui a obtenu un marché attribué à un fournisseur unique pour l’application en avril 2020. Le rapport du BVG indique que GC Strategies était responsable d’environ 19,1 millions de dollars pour le coût total de l’application, et qu’on ne sait pas exactement quel travail GC Strategies a véritablement effectué, ni même qui a embauché cette société.
Le gouvernement a un grave problème à élaborer ce genre de marchés qui coûtent très cher aux contribuables, qui n’en ont pas pour leur argent. Le rapport du BVG indique clairement que « [n]ous avons estimé que le coût journalier moyen des ressources externes dans le cadre d’ArriveCAN était de 1 090 dollars, alors que le coût journalier moyen pour un poste équivalent dans le secteur des TI au gouvernement du Canada était de 675 dollars ». Ces coûts journaliers ne devraient pas être deux fois plus élevés que l’équivalent du salaire journalier d’un employé. L’impartition et les marchés attribués à un fournisseur unique saignent les contribuables à blanc. Ironiquement, le gouvernement continue d’embaucher des entreprises comme KPMG pour les conseiller sur la façon de réduire les dépenses, mais en réalité, il pourrait réduire ses dépenses en n’engageant pas des entreprises coûteuses pour faire le travail que ses propres fonctionnaires pourraient effectuer pour une fraction du coût. Les conservateurs continueront de se servir de ce dossier pour faire de la petite politique, mais ils lancent des pierres dans une maison de verre, compte tenu de leurs antécédents avec des firmes comme Deloitte. Ce sont également eux qui ont embauché IBM pour gérer le catastrophique dossier du système Phénix, ce qui a coûté des milliards.
Le rapport de la vérificatrice générale devrait être le signal d’alarme nécessaire pour se rendre compte que l’embauche de firmes d’experts-conseils et les marchés attribués à un fournisseur unique constituent presque toujours un énorme gaspillage des fonds publics. C’est frustrant de voir ce genre de gaspillage d’argent pour l’application ArriveCAN.
La GRC mène actuellement une enquête sur les allégations d’inconduite dans le dossier de l’application ArriveCAN. Il est essentiel que nous fassions toute la lumière sur ce qui a mal tourné tout au long de ce processus bâclé. Les contribuables méritent mieux que les manchettes au sujet du gaspillage d’argent au profit des firmes d’experts-conseils.