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3 mars 2024

Les licenciements chez Bell, un autre exemple flagrant des pratiques vampiriques des entreprises

Récemment, Bell Média a annoncé le licenciement d’un nombre impressionnant de 4 800 personnes dans l’ensemble de ses services de radiodiffusion (télévision et radio), ainsi que la vente de 45 de ses 103 stations de radiodiffusion régionales. Dire qu’il s’agit d’un jour sombre pour l’information régionale et le journalisme reviendrait à sous-estimer l’incidence profonde de ces licenciements, qui visent simplement à accroître les profits d’une entreprise. Aujourd’hui, 4 800 personnes sont sans emploi, ce qui a des répercussions sur leurs familles et leurs collectivités locales, et les Canadiens et les Canadiennes de tous les horizons auront un accès réduit à l’information locale.

En fait, les commentaires spontanés du premier ministre de la Colombie-Britannique, David Eby, résument assez bien la situation : « Bell et les entreprises comme cette dernière ont supervisé la consolidation des actifs de médias locaux qui sont précieux pour les collectivités locales. Comme des vampires, ces entreprises ont vidé les médias locaux de leur substance et ont licencié des journalistes. Ils ont supervisé la « faillite programmée » des médias locaux en licenciant des journalistes et, à présent, ils affirment qu’il n’est plus économiquement viable de gérer ces stations de radiodiffusion locales et que le journalisme d’enquête n’est plus économiquement viable lui non plus. On leur a laissé le champ libre pour agir de la sorte. Le fait que les dirigeants de ces entreprises ne puissent pas trouver de façon, malgré toutes leurs maîtrises en administration des affaires (M.B.A.), d’exploiter quelques stations d’information locales pour s’assurer que les gens ont accès à de l’information exacte, objective et fiable à l’ère de la désinformation et de la folie des médias sociaux indique que toute idée de responsabilité d’entreprise a été reléguée aux oubliettes [TRADUCTION]. »

David Eby n’a clairement pas mâché ses mots, mais il a parlé du cœur du problème. Une petite poignée de conglomérats médiatiques a acheté autant de petites stations locales que possible pour réduire la concurrence, puis a supprimé ces emplois et ces stations lorsqu’elles ont commencé à enregistrer des pertes. Toutes ces réductions ont eu lieu malgré le fait que BCE Inc, la société mère de Bell Média, a enregistré des revenus d’exploitation totalisant 6,7 milliards de dollars en 2023, ce qui représente une hausse par rapport aux 6,44 milliards de dollars de l’année précédente. Bell Média a déclaré avoir enregistré des pertes d’exploitation annuelles de 40 millions de dollars, mais elle a été ravie de recevoir 155 millions de dollars au titre de la Subvention salariale d’urgence du Canada pendant la pandémie, somme qui devait servir à préserver les emplois de son personnel. Qui plus est, Bell a annoncé avec un degré d’inconscience tel que même les individus les plus irréfléchis ou les plus cupides n’auraient pas pu rivaliser que, dans sa grande générosité, elle allait verser des dividendes de 3 % à ses actionnaires. Voilà qui constitue un versement parmi les plus élevés des sociétés cotées à la Bourse de Montréal (TMX). Ainsi, il y a plus d’argent pour les riches actionnaires, moins pour le journalisme local. Bell Média a déclaré des revenus de 697 millions de dollars l’année dernière, mais il semble que cela ne lui suffit pas.

Il est clair que les médias traditionnels sont en situation de crise depuis plusieurs années. CBC/Radio-Canada a déjà annoncé qu’elle supprimerait quelque 650 emplois cette année. De son côté, Postmedia a annoncé en janvier une réduction de 11 % du nombre de ses journalistes. Toutefois, rien de tout cela ne rivalise avec ce que Bell a fait aujourd’hui. En effet, Bell a supprimé les bulletins de nouvelles télévisés à midi les jours de semaine dans toutes les stations CTV, à l’exception de ceux de Toronto, et les bulletins de nouvelles télévisés la fin de semaine dans toutes les stations CTV, à l’exception de ceux de Toronto, de Montréal et d’Ottawa. Cette situation aura de graves répercussions dans tout le pays, et la population canadienne aura de plus en plus de mal à obtenir des bulletins de nouvelles locales, télévisés ou radiodiffusés, qui les informent sur les problèmes au sein de leur collectivité.

Ce genre de situation n’offre que peu de consolation aux travailleurs. La direction de BCE a été convoquée devant le Comité permanent du patrimoine canadien pour expliquer les motifs de ces licenciements et ce que ces compressions signifient pour le journalisme local. Les néo-démocrates ont également insisté pour que les ministres du Patrimoine et de l’Industrie se présentent devant le Comité et donnent leurs impressions sur ces compressions dévastatrices, mais la majorité libérale du Comité a finalement rejeté cette proposition.

BCE a apparemment rejeté la faute sur tout le monde pour cette décision, notamment la décision récente du CRTC, qui oblige Bell à fournir aux petits fournisseurs d’accès Internet (FAI) un accès à leurs réseaux de fibre optique, ainsi que les grèves récentes chez les acteurs et scénaristes à Hollywood. Lorsqu’elle a mis la touche finale à l’entente sur le rachat de CTV en 2012, Bell a promis d’étendre et de promouvoir la diffusion et la radiodiffusion des nouvelles locales : 12 ans plus tard, nous en sommes à 4 800 emplois perdus. La solution à ce type de compressions dévastatrices consiste peut-être à ne pas laisser le gouvernement approuver les rachats d’entreprises, comme le récent accord entre Rogers et Shaw ou le rachat de HSBC par la RBC.