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4 février 2025

L’investiture de Trump, la menace de droits de douane et le point de vue du Canada

La semaine dernière, Donald Trump est devenu le 47e président des États-Unis. Du point de vue d’un observateur situé de l’autre côté de la frontière, le jour de son investiture et la semaine qui a suivi semblent annoncer une drôle de période à laquelle les Canadiens ne vont pas seulement devoir se résoudre, mais qui va peut-être nécessiter une réaction plus forte du Canada que le simple fait de vaquer à ses affaires habituelles. L’investiture de Trump fut une fête en l’honneur de l’oligarchie technologique, un festival de décrets étranges et mesquins et de propos incohérents sur la possibilité d’imposer des droits de douane qui ne feraient que nuire mutuellement aux deux pays. Qu’est-ce qui s’est donc passé, et qu’est-ce que le Canada doit en comprendre?

Le jour de l’investiture a commencé par les pompes habituelles, mais la cérémonie a dû se tenir à l’intérieur en raison d’un léger refroidissement. C’est ce qui fait que les observateurs, notamment la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, n’ont pas pu assister à la cérémonie en personne. La liste d’invités, toutefois, était assez révélatrice alors que le président-directeur général de X, Elon Musk (voir plus loin), le président d’Amazon, Jeff Bezos, le président-directeur général de Meta, Mark Zuckerberg, et le président-directeur général de Google, Sundar Pichai, étaient aux premières loges, tout comme les membres du Cabinet choisis par Trump, comme le secrétaire à la Santé et aux Services sociaux et antivaccin notoire, Robert F. Kennedy Jr., et l’ancienne présidente-directrice générale de la World Wresting Entertainment, Linda McMahon, que Trump a choisie pour démanteler le département de l’Éducation. Il y avait tout le gotha du secteur technologique, les milliardaires et leurs flagorneurs… c’est-à-dire pas précisément les gens les mieux placés pour comprendre ce que vivent les travailleurs, mais plutôt ceux qui, au contraire, sont prêts à saisir toutes les occasions qui se présentent pour les exploiter.

Le discours inaugural de Trump – comme tout ce qu’il fait, d’ailleurs – n’était qu’un ramassis de réflexions sans queue ni tête. Il y disait que plusieurs choses étaient rendues à un « niveau inouï », sans que ces affirmations soient étayées par quoi que ce soit, et il s’en est pris de manière brutale aux personnes vulnérables. Il a dit qu’il qualifierait d’« urgence nationale » les problèmes à la frontière sud et que les mesures d’expulsion allaient commencer sous peu. Il a parlé d’imposer des droits de douane à pratiquement tous les pays imaginables et de mettre sur pied le Service du revenu extérieur. Il a fait sciemment preuve de cruauté en déclarant que, selon la politique officielle de son gouvernement, il n’y avait que deux sexes.

En prononçant son discours lors de la journée d’investiture, son ami Elon Musk, pour ne pas se faire damer le pion, s’est payé un geste qui, pour le dire sans détour, ne pourrait pas légalement être reproduit dans les médias allemands. Le journal allemand Die Zeit a même publié en gros titre : « Un salut hitlérien est un salut hitlérien ». Et dire qu’il y a quelques semaines à peine, Pierre Poilievre était ravi d’obtenir son appui.

Le jour de son investiture, Trump a signé de nombreux décrets, dont un qui amnistie complètement les émeutiers qui se sont introduits dans le Capitole le 6 janvier 2021, lorsque Trump a piqué une colère parce qu’il n’avait pas remporté les dernières élections. Il compte « réinterpréter » le 14e amendement de façon à ne plus accorder la citoyenneté par droit du sol (on repassera pour sa prétendue défense de la Constitution américaine). Il veut aussi annuler les mesures de protection de l’environnement, en retirant notamment les États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat et en relançant les forages pétroliers dans la Réserve faunique nationale de l’Arctique, en Alaska. Il veut aussi abolir les règles d’égalité d’accès à l’emploi, qu’avait adoptées l’ancien président Lyndon Johnson et qui comblaient une lacune de la Civil Rights Act permettant au gouvernement fédéral de ne pas se conformer à la Loi. Autrement dit, il veut supprimer les règles qui empêchent les entrepreneurs fédéraux de prendre des mesures discriminatoires, comme refuser d’embaucher ou de payer des gens en raison de leur origine ethnique ou de leur sexe.

Les Canadiens étaient soulagés qu’il ne parle pas de droits de douane… jusqu’à ce qu’il annonce que ces mesures pourraient entrer en vigueur le 1er février. Mettra-t-il sa menace à exécution? Il faudra attendre pour le savoir.

Tout cela semble très chaotique. Pendant que nous attendons de voir la suite des choses, les menaces de Trump semblent avoir incité les Canadiens et Canadiennes à faire front commun contre sa proposition ridicule de faire du Canada le 51e État des États-Unis. Jamais ils n’accepteront que les faillites pour incapacité d’acquitter une facture médicale remplacent leur régime universel de santé (rappelons qu’aux États-Unis, les frais médicaux sont plus élevés que partout ailleurs et qu’ils sont à l’origine de 40 % des faillites personnelles). Le Canada est respecté sur la scène mondiale. Trump ne peut pas prétendre au même respect, car à Davos, les dirigeants mondiaux se sont moqués de ses propos absurdes le lendemain même de son investiture. Nous devons donc nous préparer à ce qui pourrait advenir en élaborant une riposte rigoureuse.